J’ai profité du repos et du « bureau » qui nous était attribué à l’Epicenter pour joindre par Internet les classes qui suivent le projet en France. L’expérience était nouvelle pour moi, assez inhabituelle pour que les élèves soient un peu intimidés et plus concentrés que d’habitude. La technique a permis en tout cas des échanges riches. Luc Besançon, journaliste à France Bleue Pays de Savoie, était à Cluses pour enregistrer les échanges et faire un petit entretien téléphonique.
Mes collègues avaient préparé la rencontre et les questions concernaient d’un côté l’aspect quotidien de l’aventure et, d’un autre côté, les rencontres écotopiques.
Les CM1 m’ont demandé si j’étais fatigué, si j’avais rencontré des animaux et si j’avais eu de la casse sur mon vélo. Les secondes voulaient savoir si je m’étais senti en insécurité en dormant dehors, comment je mangeais « végan » en faisant tant d’efforts, et si j’avais été bien accueilli par les américains. Quant aux terminales, plus discrets sur les aspects personnels, ils s’inquiétaient de savoir si j’allais réussir à finir le parcours !
Du côté des préoccupations écologiques, j’ai été ravi d’entendre dans la bouche des CM1 des questions telles que : « As-tu pu constater des effets du changement climatique ? » et « Quelles ont été les plus grosses sources de pollutions que tu as vues ? » ou encore « Les Américains ont-ils de grosses voitures qui polluent ? ». Les secondes voulaient savoir si les américains évoluaient sur les questions écologiques et quels étaient les problèmes liés à l’eau que j’avais rencontrés. Les terminales ont abordé les deux questions fondamentales : celle de savoir si le changement climatique était un problème politique et celle de l’avenir et des espoirs de transformations dont je peux être le témoin. Ils voulaient aussi avoir mon regard sur les primaires américaines du point de vue des questions écologiques.

Pour compléter la dimension pédagogique de mon expérience à Green River, je suis intervenu auprès des enfants bénéficiant d’un programme d’animation péri-scolaire, financé par Americorps (la branche interne de l’aide au développement) et animé avec ferveur par des jeunes diplômés faisant une première expérience professionnelle sous forme d’un volontariat dans ces institutions. Amber s’occupait en particulier d’un programme intitulé Oasis Food, destiné à l’éducation à la nourriture. Parmi les volets de ce programme, un repas donné chaque soir aux élèves « pour qu’ils aient au moins un repas équilibré par jour » me dit-elle, des cours de cuisine, un jardin potager avec compost… Elle m’a demandé de venir parler un peu du voyage aux enfants. J’ai fait un peu de géographie pour situer la France et le trajet parcouru. Puis nous avons discuté du changement climatique, de ses effets, de ses causes, des remédiations possibles. Ils n’avaient jamais entendu parler de cette réalité. Que nos actions puissent contribuer directement ou indirectement à mettre en péril la « terre mère » semblait les frapper. Peut-être l’ouverture de cette intervention exotique aurait-elle quelques résonances en son temps chez ces enfants dont les parents, pour la plupart, sont immigrés ou travaillent dans des conditions de précarité extrêmes, dans les emplois de service liés à l’économie de station-service (laver des chambres de motel, servir dans des restaurants et tenir des magasins ouvert 24h/24h).

En tous les cas, j’ai retrouvé avec joie la vivacité des enfants et la richesse de la relation pédagogique (même fugace et lointaine) qui obligent à être authentique et ouvrent sans cesse des perspectives imprévues. Merci à tous pour ces beaux cours !
Damien
Merci à Luc Besançon pour la couverture de cet échange !