# On n’est pas en sucre …

Lors de nos expéditions avec Benoît, nous avions développé un Mantra pour rester positif dans les conditions humides : « on n’est pas en sucre ». On ne va pas fondre au contact de l’eau, on peut supporter d’être mouillé, on peut rouler sous la pluie, on peut même rester joyeux sous la pluie ! Aujourd’hui j’ai goûté à la pluie de Louisiane. 2h intenses, j’ai eu le temps d’observer.

Rétractation

Face à la pluie, le cycliste sent une forme de repli sur soi. Même quand la température est modérée (autour de 20°), même quand il n’y pas congélation immédiate, la pluie produit un mouvement de recul et de tension. On voudrait s’abriter le temps que l’averse passe. On se crispe et on se fatigue.

Plaisir de l’éclaboussure

Au début surtout, il est assez facile de changer sa représentation et de trouver dans la pluie sur le visage un type de plaisir maintes fois éprouvé : l’aspersion sous la douche, le massage sous une cascade, la caresse d’un vaporisateur ou dans les jeux d’eau au tuyau, régals estivaux.

Échappée  imaginaire

C’est la durée sous l’eau qui met à l’épreuve cette réjouissance. Parce qu’il y a concentration accrue, parce que la visibilité est mauvaise, parce que le bruit des moteurs se double d’un bruit de chuintement éprouvant, parce que le vent relatif suffit à refroidir les pieds, parce que la peau des mains dans les gants détrempés se flétrie.

J’ai observé une stratégie de défense qui s’est manifesté plusieurs fois et produisait à la fois une perte de présence et un accroissement de la puissance d’agir. C’était le rappel d’un moment doux et sensuel. En l’occurence, Liane, une gracieuse néo-orléanaise, qui m’a abordé alors que j’écoutais du jazz sur Frenchmen Street. Elle accompagnait ses camarades grands danseurs de swing. Elle me proposa de danser. Nous étions tous les deux aussi mauvais l’un que l’autre. Mais les contacts doux manquent quand on voyage seul. Puis elle s’est évaporée comme elle était arrivée. Frêle et gracieuse. J’imaginais lui donner, en cadeau, « une caresse à la française ». Tous ces rappels de souvenirs et phantasmes doux et sensuels faisaient oublier la tendance à se crisper sous l’arrosoir cosmique.

L’inertie

La phase la plus intéressante est la phase après l’averse. D’un côté le visage se détend et la chaleur revient, de l’autre l’humidité persiste et crée un bain frais ou froid qui t’accompagne jusqu’à la pause. On n’est pas en sucre, mais les réactions crispées à la pluie font que c’est toujours une expérience ambivalente. Le lendemain, c’étaient des orages qui accompagnaient la froidure et l’humidité. J’attendais détrempé dans une station service de Baldwin, dans la Floride profonde. En attendant des conditions praticables, je me disais qu’on n’est peut-être pas en sucre, mais qu’on n’a du mal à profiter de notre humidité. Bref, on n’est pas en sucre, mais on n’est pas des éponges !

Damien

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