Depuis la cour de l’école du Bourg à Montbonnot, on fait face aux montagnes de Belledonne enneigées, émergeant de la brume matinale du Grésivaudan, magnifiques.
Première rencontre avec des yeux pétillants, parfois vaguement inquiets du chaos climatique dans lequel on les a fait naître et grandir, mais d’un enthousiasme explosif et réjouissant…
A la radio j’entends que Pékin est, pour la première fois, en alerte rouge à cause de la pollution de l’air. Interdiction de respirer ! Ça ne va pas fort… Une question d’Adam : « Pourquoi tu vas aux Etats-Unis et pas en Chine ? Tu pourrais y aller en vélo ». Réponse de son camarade, implacable : « Faire du vélo, c’est faire du sport. Mais c’est interdit en Chine. Donc tu ne peux pas y aller » C.Q.F.D…
On discute du Changement Climatique : ils savent, ils comprennent, ils confondent parfois avec la pollution, comme tout le monde ; ils s’imaginent la catastrophe comme brutale et à venir plutôt que déjà en marche et insensible, comme tout le monde ; certains ont peur de mourir, comme tout le monde.
Puis on part aux U.S.A., sur la carte et dans l’imaginaire. « 10 000 km ? ça fait 10 fois la France alors ! » « Et on te verra au tableau ? ».
Concentration intense, pause, puis discussion à visée philosophique : A qui appartient la Terre ? « A tous donc à personne », « aux êtres vivants », « aux ancêtres », « à Dieu », « Mais pas qu’aux hommes qui tuent les êtres vivants… »
Je suis impressionné par leur discipline dans la prise de parole et l’écoute. J’aime leur souplesse face à la réfutation et leur absence d’identification égotique aux idées, qui fait d’ordinaire de tout changement de pensée un défi identitaire.
Assez vite se dégage l’idée qu’on peut habiter un endroit sans en être propriétaire et avoir conscience d’y passer sans tout saccager. Ce n’est pas parce qu’on agit sur la Terre qu’elle est notre propriété exclusive. Belle leçon de décentrement contre l’anthropocentrisme ordinaire.
Déjà il faut finir alors que les questions fondamentales émergent spontanément : « Mais d’où vient la vie ? D’où viennent les hommes ? Qu’est-ce qu’on va faire ? ». On laisse cela en suspens : savoir s’interroger est le meilleur rempart contre tout dogmatisme.
Et dans un grand élan de joie, mes jeunes compagnons de voyage s’en vont virevoltant dans l’espace. « Bon voyage ! ». Sourires.
Damien


